Dans la religion hindouiste, la crémation est considérée comme la troisième naissance du défunt, après sa naissance biologique et la seconde naissance constituée par le mariage. Le feu doit permettre de libérer l’âme du corps afin que celle-ci passe plus facilement dans l’autre monde. Le corps du défunt allongé sur un brancard en bambou, est d’abord immergé dans l’eau du fleuve, puis brûlé sur un bûcher. Ce sont des intouchables, situés au plus bas de l’échelle sociale, qui s’occupent du bûcher. Ils sont considérés comme impurs, et aucune personne de plus haute caste ne doit toucher un cadavre.
Les sadhus, des ermites qui ont choisi la voie de l’ascétisme, sont quant à eux simplement immergés dans le fleuve, leur pureté les ayant libérés de la nécessité de la crémation. De même les lépreux, les femmes enceintes et les enfants de moins de 10 ans sont purs et n’ont pas besoin du feu salvateur. Il y a des lieux de crémation au bord de toutes les rivières. Dans tout le sous-continent indien, le lieu le plus sacré reste la ville de Bénarès, où environ 200 corps brûlent chaque jour au bord du Gange. Bonjour la déforestation quand on sait qu’il faut un petit arbre pour réduire chaque corps à l’état de cendres.
Dans le district de Darbhanga [Etat du Bihar, dans le nord de l’Inde], des hommes entassent dans un chaudron de terre cuite attaché à la proue d’un bateau, des pains de bouse et de l’herbe sèche. Puis ils y introduisent un cadavre humain. Ils arrosent le tout de carburant et y mettent le feu. Une fumée monte dans le ciel. Ce chaudron est un bûcher funéraire. Le bois se faisant rare, c’est de cette façon que les personnes qui vivent sur des bateaux durant les crues de la rivière Bagmati procèdent à la crémation de leurs proches.
Depuis quelques années, l’incinération au moyen de déjections animales s’est répandue dans le district. Nombreux sont ceux qui préfèrent au bois ce combustible bon marché, disponible en quantité et à bas prix.
Le terrain crématoire [espace en plein air réservé à la crémation dans la religion hindouiste] propose désormais des pains de bouse pour les bûchers funéraires. Chaque pain de forme cylindrique pèse 1,5 kilo. Il en faut environ 200 kilos pour brûler un corps. Dans une fosse circulaire, les cylindres sont disposés en couches, entre lesquelles repose le cadavre. On les tasse bien dans le trou, en y laissant une petite ouverture pour les derniers rites. “Quatre ou cinq crémations ont lieu chaque mois”, précise Dheeraj Tiwari, un officiant du crématorium de Kusheshwarnath.
C’est Vidyanath Jha, professeur de botanique et doyen du M.R.M. College, à Darbhanga, qui est à l’origine du succès de cette pratique. Alors qu’il enquêtait sur la disparition des vergers de manguiers dans cette zone, M. Jha s’est aperçu que de nombreux arbres étaient abattus pour les besoins de la crémation, leur bois étant censé porter chance. Cherchant une solution de substitution au bois, M. Jha a découvert une communauté de potiers qui recouraient aux chaudrons en terre et aux pains de bouse pour incinérer leurs morts.
Désormais, une opération de crémation sur quatre dans le district se fait avec des excréments animaux, indique le professeur Jha, qui, depuis cinq ans, n’a pas ménagé sa peine pour populariser la pratique. Ce sont les kumhars, nom de la caste des potiers, qui lui ont appris la technique. “Ils sont experts dans l’art d’arranger les pains de bouse de manière à produire le maximum de chaleur, indispensable à la crémation”, explique-t-il. “Cette pratique est transposable ailleurs dans le pays pour sauver des arbres”, plaide-t-il. Le Bihar possédant une couverture forestière éparse et aucun crématorium électrique, il faudrait également adopter cette méthode dans d’autres districts. Sur les trente-huit divisions administratives que compte cet Etat, sept n’ont pas de forêt, et dans le nord, celle-ci ne représente que 1,92 % du territoire.
Au début, le professeur Jha redoutait la réaction des communautés hindoues où il allait porter la bonne parole. Il eut la surprise de ne se heurter à aucune résistance. La raison, a-t-il compris, tenait au fait que les excréments bovins sont également considérés comme des porte-bonheur. Depuis quelques mois, les catégories aisées et les citadins sont à leur tour conquis.
Cependant, des scientifiques ont critiqué l’utilisation de déjections animales dans les bûchers funéraires. A les en croire, la bouse devrait servir de fumier pour développer l’agriculture ou de combustible pour la production de biogaz.
Tout en acceptant ces reproches, le professeur Jha rappelle à ses détracteurs l’ampleur de la pénurie d’énergie, le sous-développement de la région et le recul des zones forestières dans le Bihar. “Chaque opération d’incinération nécessite entre 240 et 280 kilos de bois, c’est-à-dire l’abattage d’un arbre adulte”, souligne-t-il. Il est en train de rédiger un rapport sur la crémation par combustion de pains de bouse. Si celui-ci pouvait faire bouger les autorités, sa tâche en serait facilitée.
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Retour en France. Plus précisément dans notre famille. Ma mère est bouddhiste. Ils sont parait-il 600 000 adeptes de Bouddha en France dont la plupart originaires des pays asiatiques. Ma mère est d’origine flamande (donc chrétienne) et non asiatique. C’est sa conversion au crudivorisme non-végétarien, après des années de régime « biscottes et café », qui décida semble t’il de son ralliement au bouddhisme. Lequel prône pourtant le végétarisme comme hygiène de vie personnelle…. C’était la fin des années 80. Epoque où Mathieu Ricard devint le « porte-parole » du dalaï-lama en France. Rappelez vous « l’ offensive bouddhiste » des grands médias français, qui précéda de quelques années la grande opération de réhabilitation médiatique du bio. Par la magie de la télé, ceux qui se disaient bouddhistes ou qui mangeaient bio n’étaient soudain plus considérés en France par leurs voisins ou leurs collègues de travail comme de vulgaires « zadistes », mais comme des gens « à la page »…..
Fraîche comme un gardon à 85 ans passés, ma mère a émis récemment le vœu de se faire incinérer après sa mort. Comme elle a la taille et la corpulence d’un Gandhi sortant de 10 jours de jeûne, elle ne devrait pas coûter cher en gaz au crématorium ( j’ignore si le crématorium règle la minuterie du four sur le poids de la personne. Il faudra que je leur demande …. ). Une mort qu’elle envisage sereinement dans une trentaine d’années. La crémation n’est pas une règle systématique chez les bouddhistes, mais c’est une pratique courante. Bon. Il me reste quelques décennies pour la convaincre de n’en rien faire. Je m’amuse à lui rappeler que le comble pour un ou une crudivore, c’est quand même de se faire incinérer. Je lui parle de la métaphysique des ascètes hindous qui n’ont pas besoin du feu salvateur pour libérer leur âme à leur décès. Il est vrai que ma mère n’en est plus à une contradiction près.
Je suis contre la crémation et j’ai mes raisons. Entre autres : pas question que les gaziers se fassent du blé sur ma dépouille après ma mort. Rien à voir avec le fait que les crématoriums sont la première source de pollution aux vapeurs de mercure dans les villes (un tiers des vapeurs de mercure en Suède, où la crémation est une pratique courante, s’explique par les amalgames dentaires brûlés dans les crématoriums). Les multiples pollutions générées par les crématoriums explique que les municipalités les exilent en périphérie des villes, histoire de partager la pollution avec les ruraux… Même les américains commencent à penser que les crématoriums c’est pas sérieux au plan écologique, et proposent désormais la « dissolution » ou « liquéfaction » des corps dans un bain chimique comme alternative à l’inhumation ou à la crémation. Comme dans « Breaking Bad » ….
J’ai donc cherché à savoir combien il faut brûler de kilos de propane pour réduire un corps de corpulence moyenne à un petit tas de cendres. J’ignore si l’argument de la soutenabilité écologique de l’incinération est susceptible de dissuader ma mère d’abandonner son projet de se volatiliser dans un four chauffé à 850° C. Je n’ai pas la moindre idée du chiffre en question.
Par chance, la municipalité de Martigues (13) a rendu public les termes du marché d’approvisionnement en gaz propane de son crématorium : « Fourniture et pose de 2 citernes enterrées de 3 200 kg en location ». Notez bien le » EN LOCATION » . Malgré une consommation de propane gigantesque (voir ci-dessous), la municipalité de Martigues souhaite des citernes « en location » et non pas des citernes en pleine propriété. Faut les comprendre ces administrateurs super-avisés qui ne souhaitent pas s’encombrer de citernes propriété client : dès fois que le crématorium serait appelé à fermer ses portes du jour au lendemain faute de dépouilles… ! Rassurons le service des marchés publics de la ville de Martigues : vu le niveau de respect du corps humain enseigné et pratiqué dans les facultés de médecine françaises (cf la récente affaire des bizutages) ces temples de la vulgarité athée que sont devenues les facultés de médecine depuis la Révolution n’ont pas fini de former des cohortes de médecins demeurés, expédiant nos aînés «ad patres» avant qu’ils aient atteint l’âge canonique.
Je lis donc les détails de l’appel d’offres de la mairie de Martigues « Livraison de gaz propane pour la durée du présent marché. Le gaz propane est la source d’énergie dont le four de crémation de la marque ATI modèle CR 2000 a besoin pour fonctionner. Les estimations de consommation sont les suivantes: consommation minimale: 500 crémations / an x 950 Kwh / crémation = 475 000 Kwh. Consommation maximale avec 1 200 crémations / an x 950 Kwh / crémation = 1 140 000 Kwh »
Il faut donc en moyenne 950 KWh pour réduire un corps en cendres, soit l’équivalent de 2 bouteilles de propane de 35 kg (ou deux ans de cuisine au gaz pour une famille). Le crématorium municipal de la seule ville de Martigues consomme ainsi de 35 à 84 tonnes de propane par an pour brûler de 500 à 1200 dépouilles selon les années. En 1975 on comptait 2000 crémations par an dans toute la France. En 2011 ce chiffre a atteint 167 000 (31 % des obsèques). Si toutes les crémations étaient faites au propane ( ce qui est loin d’être le cas, la plupart des crématoriums fonctionnant au gaz naturel, et peut être pour une poignée à l’électricité) 167000 crémations par an représenteraient l’équivalent de 11,7 millions de kilos de gaz propane par an pour satisfaire la « mode » des crémations importée d’Asie et d’Europe du Nord.
11 700 tonnes soit 25 000 m3 de propane, représente 30 % de la capacité des plus gros navires gaziers circulant actuellement sur les mers : les VLGC (photo ci- dessous).

VLGC KIKYO ( Helios LPG ) Capacité 82 521 m3
En Europe du Nord, 70 % des funérailles se terminent par une crémation. La consommation de gaz naturel et de gaz propane des crématoriums est monstrueuse. Si les gaziers se frottent les mains, c’est parce que la France et les pays de tradition catholiques d’Europe du sud alignent progressivement leurs rites funéraires sur les pratiques des pays d’Europe du Nord, lesquels ne font que copier les rites asiatiques.
Alors on arrête quand ce délire crématoire digne de la Géhenne ?