Pour favoriser le changement de fournisseur, l’Etat du Vermont supprime tous les frais de retrait de citerne
L’ADECOPRO en a rêvé. L’Etat du Vermont (USA ), l’a fait. Et de belle façon. Par une loi adoptée en 2011, le Vermont a rendu illégal sous certaines conditions la perception de frais relatifs à la terminaison des contrats de fourniture de gaz en citerne. Ces frais incluent notamment les frais de retrait de la citerne de gaz, lesquels sont souvent fixés à des niveaux dissuasifs.
Les propaniers ne font pas payer les frais de mise en place de leurs citernes en début de contrat. Ils se réservent ainsi la possibilité d’exiger des frais de retrait au moment où le consommateur souhaite éventuellement pouvoir changer de fournisseur. En imposant des frais de sortie de contrat (incluant les frais de retrait de citerne) très élevés, les propaniers parviennent à dissuader nombre de consommateurs à passer à la concurrence. Et lorsque, malgré tout , le consommateur décide de passer outre et de changer de fournisseur, le propanier peut toujours se consoler avec la marge qu’il réalise sur l’opération de retrait de la citerne : les sommes demandées aux consommateurs français, s’établissent selon les contrats de 500 € à 1400 € pour l’enlèvement d’une citerne aérienne ou enterrée. Alors que le coût d’enlèvement d’une citerne ne dépasse pas 200 € pour le propanier : les entreprises sous-traitantes s’organisent pour regrouper plusieurs enlèvements sur une même tournée dans le laps de temps ultra long (90 jours) dont elles bénéficient réglementairement en France pour procéder au retrait des citernes. De fait les frais de sortie de contrat sont beaucoup plus élevés en France que dans les pays voisins. Ce qui explique que les consommateurs français changent très rarement de fournisseur : c’est la vente du pavillon qui provoque le plus souvent le changement de propanier et le remplacement de la citerne du propanier sortant par la citerne du nouveau propanier .
Qu’a donc décidé le Vermont pour empêcher les propaniers d’entraver la concurrence en gonflant artificiellement les frais de sortie ?
A la suite d’une enquête du Procureur Général, faisant suite aux plaintes des consommateurs, le gouverneur du Vermont a décidé que les frais de retrait de citerne étaient ni plus ni moins des frais de changement de fournisseurs ( « switching costs » ), abusivement imposés en fin de contrat dans le seul but de dissuader de changer de prestataire. Exit donc les switching costs ! Voilà ce que dit la loi de 2011 du Vermont relative aux contrats de propane (remaniée en 2014 sous le nom « N°111 An act relating to terminating propane service » )
« Au moment d’interrompre le service (de fourniture de gaz) à un client, le propanier devra se conformer aux prescriptions suivantes :
1) Si le réservoir de stockage de gaz a été installé sur le lieu de résidence du client, que ce dernier soit ou non propriétaire des lieux, pendant 12 mois ou plus, le propanier ne pourra pas demander le paiement de frais liés à la fin du service de livraison de propane, y compris des frais :
- pour enlever la citerne appartenant au propanier, des lieux occupés par le client
- pour repomper le gaz ou le restocker
- de terminaison de service
2 ) Pour une durée de service inférieure à 12 mois, tous frais ou commissions relatifs à la terminaison du service ne pourra pas dépasser le prix de la main d’œuvre et des matériaux. Ce prix devra avoir été porté à la connaissance du client.
3 ) Dans les 20 jours qui suivent la date d’interruption définitive du service par le propanier ou, si celle-ci a lieu avant, de la réception de la notification écrite par le client de sa volonté d’interrompre la relation, le propanier devra retourner au client le montant payé par le client pour le gaz restant dans la citerne , moins les montants dus au propanier par le client. »
Ah ! Qu’on aime découvrir qu’il existe encore sur terre des pouvoirs publics sachant réellement défendre les consommateurs au lieu de se perdre en gesticulations médiatiques et en effet d’annonces. Ca nous change de notre triste loi Hamon, qui en matière de contrats de GPL, a eu à un peu près le même retentissement qu’un pet de truite dans un torrent de montagne.
Les mesures d’autorité publique prises par les Etats de la Nouvelle Angleterre ( Maine, Vermont, New Hampshire…) à l’encontre des propaniers américains sont intéressantes car le cadre économique et juridique dans lequel évoluent ces propaniers semble assez proche du cadre français. En effet la proportion de citernes propriété client est identique en Nouvelle Angleterre et en France (3 -4 % du total du parc installé) et reste très inférieur au niveau existant dans les pays où la concurrence n’est pas faussée (Allemagne); il semble par ailleurs que les propaniers déploient en Nouvelle Angleterre les mêmes stratagèmes mensongers que ceux déployés en France pour dissuader les consommateurs de devenir propriétaire de leur citerne; enfin le propane vendu en Nouvelle Angleterre, notamment dans sa partie septentrionale, est nettement plus cher que sur la Cote Est des Etats Unis (ce qui est aussi le cas de la France relativement à ses voisins du nord). La différence notable entre la situation du consommateur de Nouvelle Angleterre et du consommateur français, c’est la présence de dizaines de petits distributeurs indépendants qui parviennent à vivre à côté d’une poignée de gros distributeurs.
A l’inverse, le marché allemand diffère notablement du marché français ou celui de la Nouvelle Angleterre car il est ultra concurrentiel; quant au marché anglais, dont le niveau de concurrence se situe à un niveau intermédiaire entre le marché allemand et le marché français, son insularité fait qu’il ne fonctionne pas selon le modèle continental: la décision de la Competition Commission d’obliger les propaniers à se racheter les citernes dès lors que le consommateur souhaite changer de propanier en fait un cas (ou un modèle) à part.
Cette sémiologie comparée des « troubles du comportement commercial » des propaniers des deux côtés de l’Atlantique permet d’entrevoir un traitement identique : nous avons quelques raisons de vouloir soigner les désordres communs à certains cartels du gaz en utilisant les mêmes recettes légales. Sollicitons donc nos députés pour les convaincre de faire passer un projet de loi identique à celui du Vermont, afin d’en finir avec ces maudites entraves à la concurrence.
Rachat du gaz inutilisé en fin de contrat : une obligation qui protège les consommateurs français
Votre contrat se termine et il vous reste du gaz dans la citerne qui doit bientôt être récupérée par le propanier ? Vous ne voulez pas payer les 350 € de frais de repompage du gaz exigés par votre propanier avant de retirer sa citerne ? Vous avez toujours la possibilité d’ouvrir la vanne et d’en laisser partir suffisamment dans l’atmosphère pour redescendre en dessous du niveau maximum autorisé pour le transport de cette citerne ( ce pourcentage maximum dépend de votre modèle de citerne : le site Acqualys et/ou votre propanier peuvent vous communiquer l’information).
Si vous me posez la question de savoir s’il est dangereux de vider ainsi le contenu de sa citerne dans l’atmosphère, je vous répondrai que c’est un peu comme descendre du train en marche. C’est pas recommandé, mais « y en a quand même qui ont essayé ». Ne me demandez pas de vous dire (et encore moins d’écrire) que l’opération consistant à répandre du propane dans l’atmosphère n’est pas dangereuse. Cette opération est dangereuse car une mini quantité de gaz confinée dans un espace clos peut donner lieu à une maxi-explosion. Le gaz est paradoxalement moins dangereux quand il brûle car sa présence devient alors visible, au lieu de ramper sournoisement sur le sol à la recherche de la moindre étincelle. Mais là encore je ne saurais trop vous dissuader de torcher le restant de gaz au-dessus de votre citerne. La pratique consistant à torcher le gaz est strictement réservée aux professionnels du gaz et aux services de secours. Et puis ça risque de laisser quelques traces de combustion sur les accessoires de la citerne que vous êtes censé restituer à votre propanier en parfait état……
A propos de torchage de gaz, je me permets une courte diversion. La quantité de méthane torchée à proximité des puits de forage de pétrole de schiste (faute de pouvoir être transporté ou stocké sur place) représente 300 millions de m3 de gaz PAR MOIS dans le seul Dakota du Nord. Des dizaines de milliers de flammes se consument nuit et jour au-dessus des torchères plantées dans les grandes plaines du Dakota donnant l’impression, vu de satellite la nuit, que cet état, un des moins peuplés des Etats Unis, est aussi densément peuplé que la métropole voisine de Minneapolis-Saint Paul. Une proposition de résolution de ce problème de « gaz-pillage » écologique, exposée récemment dans le Wall Street Journal par un chercheur d’un think-tank conservateur américain (« Fixing a power failure in the shale boom »), avance l’idée de demander aux autorités du Dakota du Nord d’étendre à l’électricité qui pourrait être obtenue grâce à des générateurs fonctionnant au méthane, le schéma de rachat obligatoire à prix subventionné de l’électricité produite actuellement par l’énergie solaire et éolienne. On imagine la bronca que ne manquerait pas de susciter, chez les écologistes européens, pareille proposition de récupération par le lobby pétrolier d’une mesure destinée à favoriser le développement des énergies renouvelables. Aussi astucieuse soit-elle, cette solution, qui, selon son auteur, pourrait fonctionner sans avoir recours à un subventionnement des prix de rachat, a peu de chance de voir le jour dans cet état frontalier avec le Canada : on ne transforme pas du jour au lendemain des bouts de lignes électriques prévues pour alimenter quelques fermes isolées en Kwh, en lignes électriques capables de transporter des Mwh au-delà des frontières de l’Etat. Comme quoi, on a beau aduler la main invisible du marché, il parait difficile de se passer totalement de planification écologique quand on veut préserver les ressources naturelles. En attendant de trouver la solution, le gaz-pillage lui, continue….
Je referme la parenthèse, et je reviens sur le sujet du jour : l’obligation contractuelle faite au propanier de racheter le gaz propane restant dans la citerne lorsque votre contrat d’approvisionnement en gaz se termine. Cette obligation ne concerne évidemment que les consommateurs qui ne sont pas propriétaires de leur citerne de gaz: la question du gaz résiduel ne se posant qu’au moment de la récupération de la citerne par son propriétaire. L’obligation de rachat est très rare dans le droit de la consommation. Beaucoup trop rare même ( on pourrait par exemple obliger les labos pharmaceutiques à racheter les médicaments non consommés etc……..Dans certains secteurs, l’obligation de rachat par le fabricant de son propre matériel usagé pourrait être un excellent moyen de lutter contre l’obsolescence programmée). Il faut la distinguer de l’ « obligation de reprise » qui est limitée à une durée plus ou moins longue après l’achat du bien ou de la marchandise par le consommateur. Contrairement à l’obligation de reprise, l’obligation de rachat ne connait pas de péremption : même si vous avez acheté votre gaz 5 ans plus tôt et que vous n’avez plus jamais commandé de gaz depuis, le propanier sera obligé de le racheter à son tarif actuel. Et tant mieux pour vous si le prix du gaz a doublé entre temps .
Pourquoi une telle obligation de rachat imposée au propanier ? Pour le comprendre, il suffit de regarder ce qui se passe là où il n’existe pas d’obligation de rachat, comme cela semble être le cas aux Etats Unis. Qu’arrive t’il en effet si le consommateur et le propanier ne s’entendent pas sur le prix de rachat du gaz restant dans la citerne ? Le retrait de la citerne risque de se faire aux conditions imposées par le propanier. Ce dernier peut en effet dire à son client : «soit vous me faites cadeau du gaz restant dans ma citerne, soit j’attends que cette citerne soit vide pour venir la retirer ». Et le consommateur pressé de voir la citerne partir, sera perdant dans les deux cas. Cette obligation de rachat par l’ancien propanier n’est donc pas simplement une mesure de justice vis-à-vis du consommateur, elle vise aussi à le protéger contre un fournisseur potentiellement abusif.
Vous pensez que cette situation relève du simple jeu de la négociation entre distributeur et consommateur et ne mérite donc pas d’être réglementée ? Alors lisez l’histoire qui suit.
Un couple d’américains de la ville de Lower Township , dans le New Jersey ( près d’Atlantic City) gravement blessés dans l’explosion de leur maison, vient de se voir attribuer il y a 15 jours, par la Cour d’appel du New Jersey, une indemnité de 1,9 millions de dollars à verser par deux entreprises locales : une entreprise de plomberie Shore Guys Heating and Air Conditioning et un petit propanier indépendant South Jersey Fuel and Propane.
James et Evelyn McCarty étaient à l’intérieur de leur maison de bois le 7 novembre 2013 quand l’explosion de gaz propane qui fit trembler tout le voisinage réduisit celle-ci en un tas de charbon et de débris carbonisés. Ce sont les voisins qui vinrent tirer les deux occupants, âgés à l’époque de 67 ans, des restes fumants de leur maison.
Là où l’histoire devient épique, c’est que cette maison n’était plus chauffée au propane depuis avril 2013. Elle était chauffée au gaz naturel depuis que le couple avait décidé de profiter d’une opération promotionnelle pour se raccorder au réseau de gaz de ville.
Pendant les travaux de conversion, les techniciens de l’entreprise de plomberie Shore Guys ont coupé les tuyaux passant sous la maison et fermé la vanne de la citerne de gaz, sans la verrouiller de manière à empêcher que quelqu’un puisse la ré-ouvrir par mégarde. Les ouvriers ont juste fermé la vanne de sortie de la citerne et ont quitté le chantier en oubliant de débrancher de la citerne le tuyau de gaz principal dont les différents piquages avaient été coupés sous la maison.
La citerne de gaz était la propriété de South Jersey Fuel and Propane. Le propanier avait été notifié de la conversion de la maison au gaz naturel et le compte client avait été soldé. Mais le propanier n’a pas procédé à l’enlèvement de la citerne. Pourquoi ? Les propriétaires de la maison étaient en effet propriétaires du gaz restant dans la citerne et ils avaient l’intention d’utiliser ce gaz en le faisant brûler dans leur foyer-cheminée ( ndlr : ces inserts au gaz, très courants aux Etats Unis, sont utilisés à la fois comme déco et comme complément de chauffage central ). Selon McCarty : «le propanier ne nous a pas offert de racheter le gaz restant. Ils nous ont dit « Finissez votre gaz et nous reviendrons chercher la citerne quand elle sera vide »».
Six mois après l’intervention du plombier, et la citerne toujours sur place, incapable d’allumer son foyer-cheminée au gaz, le couple demande à leur voisin de venir les aider à allumer le foyer au gaz. Ledit voisin, trouvant bizarre que la vanne de la citerne soit fermée, ré-ouvre la vanne de la citerne sans savoir que plusieurs tuyaux de gaz avait été coupés sous la maison. Ceci a eu pour conséquence de renvoyer le gaz restant dans la citerne dans les tuyaux coupés. L’enquête a conclu que le lendemain de la réouverture de la vanne de la citerne par le voisin, en prenant sa douche, Mr McCarty a allumé le chauffe-eau qui a provoqué l’explosion du gaz accumulé sous la maison.
Si Mr McCarty avait vécu en France, une telle histoire n’aurait pas pu lui arriver : même à supposer qu’un ouvrier puisse commettre de pareilles négligences sur un chantier (absence de sécurisation de la citerne et des conduites de gaz), le propanier aurait été obligé de racheter le gaz restant et d’enlever prestement la citerne, faisant disparaître le risque d’une mauvaise manipulation ultérieure de la vanne d’arrêt de la citerne.
C’est donc avec raison que l’entreprise de plomberie ET le propanier ont été condamnés à verser une indemnité au couple de plaignants. Considérée comme principale responsable, l’entreprise de plomberie devra s’acquitter de la majeure partie de cette indemnité (1,6 M.USD) alors que le propanier devra payer 275 000 USD.
Il convient donc de réviser la conclusion d’un précédent article publié sur le même sujet (cf archives de juin 2015). Pour rendre compte du nombre très élevé d’accidents liés aux citernes de propane aux USA, il ne faut pas simplement questionner l’absence de compétence professionnelle des ouvriers américains intervenant sur le gaz (l’exemple ci-dessus est malheureusement flagrant), ou la légèreté et l’imprudence des consommateurs américains, mais il convient aussi de remettre en cause le nombre insuffisant de garde-fous édictés par la réglementation relative à l’usage des citernes de gaz.
Du propane spot à prix négatif au Canada : les producteurs paient désormais pour s’en débarrasser
Les analystes en avaient prédit la possibilité dès le mois de mars du fait de la faiblesse des prix de gros sur le marché américain, lequel détermine les prix sur le marché canadien. Le marché leur a donné raison dès le 19 mai dernier. Les prix du propane spot à Edmonton sont désormais nuls ou négatifs. En clair, cela signifie que les producteurs de propane paient désormais les distributeurs pour se débarrasser de leur propane. Des distributeurs américains qui n’ont jamais fait autant de marge car les prix à la consommation baissent beaucoup plus lentement que les variations à la baisse du cours du propane. Le propane Edmonton est ainsi passé de 28 c/USG en mars dernier à -4,4 c/USG , les autres liquides de gaz naturel (LGN ou NGL en anglais : éthane, butane, propane….) étant affectés de la même manière par la baisse des prix sur le marché midcontinental ( Conway).
Les traders actifs sur le spot de l’ouest du Canada ont déclaré qu’on leur offre du propane gratuitement, et qu’on les indemnise même pour les frais de transport qu’ils encourent. Cette indemnisation est proposée soit sous la forme d’un crédit contre d’autres achats, soit sous la forme de frais de transport réduits, ce qui permet de redonner une valeur positive à la marchandise. En effet les logiciels informatiques standards ne permettent pas d’entrer des prix de vente négatifs. Ces deux manières de faire sont les deux seules qui permettent de contourner le problème administratif posé par des prix de vente négatifs.
Certains contrats d’approvisionnement contiennent des clauses qui empêchent le propane de descendre en dessous de zéro. Les volumes achetés en spot à Edmonton sont souvent ceux que les grossistes lient à des contrats de stockage, principalement le propane chargé et stocké dans les wagons.
Selon le Canadian National Energy Board (NEB) « Nous avons une situation de surproduction dans l’Ouest canadien. Les producteurs de gaz naturel ont été incités ces dernières années à aller chercher les réserves de gaz riches en liquides ( ndlr : riches en LGN ). Il y a une poche régionale de propane qui est coincée dans l’ouest canadien sans débouchés locaux »
Les distributeurs de propane qui achètent au prix de gros et revendent au détail sont les grands gagnants de la surabondance actuelle de l’offre. La chute des prix de gros ne fuitera que très lentement vers les consommateurs de gaz en citerne ou en bouteille.
La forte production de gaz naturel aux USA est la principale coupable de cette situation de surproduction en Alberta. En inversant le sens de son pipeline COCHIN en 2014 qui traverse le Minnesota, Kinder Morgan a annoncé qu’il arrêtait les importations en provenance du Canada. Kinder Morgan supprimait ainsi une bonne partie des débouchés du propane canadien sur le territoire des Etats Unis. L’absence de relève industrielle locale a fini par plomber le propane d’Edmonton. En l’absence de terminaux d’exportation à partir de la côte de British Columbia pour les années à venir (ces projets font face quelques fois à une forte opposition de la société civile), seule l’amélioration du transport domestique par voie ferrée permettra de remédier durablement à la situation.
Accidents domestiques liés au GPL aux Etats-Unis : des statistiques effarantes
Le nombre d’accidents liés au propane aux USA, ainsi que la diversité des scenarii d’accidents, justifie amplement l’existence d’un cadre réglementaire particulièrement contraignant en Europe pour la distribution des GPL. Avec des centaines d’incendies et explosions domestiques imputables directement au propane chaque année (citernes et bouteilles confondues), les USA sont en effet un excellent terrain d’observation pour qui a la charge d’éviter en Europe pareilles déconvenues aux consommateurs ! Vu à travers la lorgnette de «Google Actualités», les Etats Unis semblent avoir un VERITABLE problème de qualification des ouvriers travaillant sur les conduites de gaz et appareils au gaz. L’absence d’exigence de certification «gaz» des plombiers opérant dans les entreprises du bâtiment parait être un des facteurs permettant d’expliquer la relative dangerosité du propane aux Etats Unis, comparé à l’Europe. Un autre facteur aggravant, plus culturel, et donc plus difficile à circonvenir, semble être un « excès de confiance en soi » de l’américain moyen, qui le pousse apparemment beaucoup plus facilement qu’en France, à prendre des initiatives douteuses et potentiellement dangereuses sur ses équipements fonctionnant au gaz. Ces réflexions sont la synthèse de ce que je lis dans la presse, et en aucun cas le résultat d’une étude poussée sur la question.
Quoi qu’il en soit, la réputation de dangerosité du propane chez les américains n’apparaît pas usurpée lorsqu’on suit l’actualité des accidents domestiques liés aux gaz de pétrole liquéfié de l’autre côté de l’Atlantique. Pas une semaine ne se passe sans qu’une citerne de propane ne soit impliquée dans un accident de type collision voiture contre citerne aérienne (les américains ignorent l’intérêt de clôturer leur jardin), incendie ou explosion. Pour les bouteilles de GPL, ces accidents sont encore plus fréquents, barbecue oblige. Semaine après semaine, le décompte d’accidents apparaît tellement grotesque, même en tenant compte du nombre d’habitants beaucoup plus élevé, que le lecteur européen finit par se faire la réflexion «il y a forcément quelqu’un, en dehors des propaniers, que ce nombre d’accidents interpelle : une association des victimes du gaz propane, un groupement d’assureurs ou une administration publique… ». Et bien il semblerait que non ! Tout le monde là-bas semble trouver cela normal. En tout cas je n’ai trouvé sur Internet aucun « lobby » (civil ou professionnel) désireux de faire ce qu’il faut pour faire baisser le nombre d’accidents ! Les avocats américains, par contre, ont bien flairé le filon : ils sont quelques-uns à dédier une page du site internet de leur cabinet à racoler les nombreuses victimes américaines du gaz propane ….
Il faut dire que les propaniers américains, dont la responsabilité n’est, la plupart du temps, pas en cause dans ces accidents (*), mettent beaucoup de cœur à l’ouvrage pour faire oublier la mauvaise réputation du propane en Amérique du Nord. Les professionnels américains du propane sont réunis au sein de la National Propane Gas Association (NPGA). Avec une candeur désarmante, cette organisation publie sur un de ses sites de très vieilles statistiques d’accidentologie du gaz propane des années 2000 à 2004 ( on se demande bien pourquoi des chiffres vieux de 10 ans ), pour essayer de faire croire que le propane n’est pas dangereux aux Etats Unis. On croit rêver en lisant les commentaires des professionnels du GPL sur ces statistiques ( le discours s’adresse aux consommateurs américains ) :
« Beaucoup essaient de faire croire aux consommateurs que le propane est une énergie dangereuse. Mais en réalité les statistiques d’utilisation du GPL, combinées avec les statistiques d’accident révèlent une toute autre histoire, bien plus précise que ce que les sceptiques essaient de vous faire croire. Les statistiques fournies ci-dessous sont basées sur des informations collectées et fournies par la National Fire Protection Association pour des accidents survenus entre 2000 et 2004, dès lors que le GPL a été le premier matériau à prendre feu lors de l’incendie d’une maison. En d’autres termes, le propane a été dans chaque cas répertorié, le combustible qui a permis à l’incendie de démarrer. En 2001, 9.4 millions de maisons utilisaient le GPL aux Etats Unis. Les chiffres ne mentent pas et les faits non plus. Faites votre propre choix. »
On se dit alors que les statistiques de ces années-là ne doivent pas être trop mauvaises. Mais stupeur, les commentaires donnent à lire ce qui suit :
« En moyenne annuelle sur la période 2000-2004, le nombre de maisons ou bâtiments résidentiels américains qui ont brûlé à chaque fois que le GPL était le PREMIER matériau à avoir pris feu » était de 0.000148. Dit comme cela, cela parait infime, mais en présentant le chiffre autrement, c’est plutôt gigantesque : une proportion invraisemblable de 0.148 pour mille maisons, soit une maison sur 6 762 ! Voilà donc ce qui permet d’expliquer pourquoi Google Actualités grouille d’accidents de propane aux USA : 1390 incendies de maisons ( et pas juste le barbecue qui prend feu !) causés par le GPL en moyenne chaque année entre 2000 et 2004 ! Et la NPGA de trouver ce chiffre très bas ! Il faut vraiment que le propane leur rapporte un monceau d’or pour que ces types ne se rendent pas compte de l’énormité du chiffre en question.
Imaginez en France : 550 000 citernes de propane domestiques installées (en incluant celle non utilisées). Avec un taux d’accident pareil, notre pays déplorerait 80 maisons incendiées ou explosées par le GPL chaque année ! 80 maisons par an ! Vous imaginez le scandale que cela provoquerait ! Au bout de 10 maisons incendiées dans l’année, le gouvernement serait prié de répondre aux députés ; au bout de 20 maisons, un rapport d’enquête parlementaire serait établit; au bout de 25 maisons incendiées, une tête de haut fonctionnaire tomberait et à la 30ème maison, la tête du ministre du développement durable serait sur le billot.
C’est ainsi que sur la même période, les propaniers américains ont déploré en moyenne un blessé pour 48 700 utilisateurs de GPL , et un mort pour 408 700 utilisateurs (23 décès par an en moyenne de 2000 à 2004). Comme ils écrivent sur le site (sans rire) ces blessés et ces morts sont « so very rare». So very rare ? Are your sure ? La vie humaine ne doit pas avoir le même prix de l’autre côté de l’Atlantique.
Puisqu’il est légitime de penser que la NPGA n’a publié que les statistiques des meilleures années pour ne pas effaroucher les consommateurs américains, qu’est-ce que ça doit être pendant les mauvaises années…
Vu la dangerosité des citernes, heureusement que le port de citerne de propane sur soi n’est pas protégé par la constitution américaine….
(*)si ce n’est collectivement à travers leur incapacité ou manque de volonté à faire adopter une loi fédérale sur la qualification des plombiers habilités à travailler sur le gaz.