1ere partie : Le grand cirque des ventes et prestations liées, ou comment le consommateur se fait gruger à la signature du contrat
Dans les contrats des propaniers la fourniture du gaz n’est jamais seule. Il existe pour tous les propaniers des clauses liant la fourniture du gaz soit à la fourniture de la citerne et à un contrat de maintenance de la citerne, soit à un contrat de maintenance seul ( dans le cas où le client est propriétaire de sa citerne).
Les propaniers prennent prétexte de ces liens contractuels qu’ils considèrent licites pour garder l’exclusivité de l’approvisionnement aussi bien vis a vis des non-propriétaires de citernes que des propriétaires de citernes.
Selon la Directive Européenne 2005/29 , une pratique commerciale est considérée comme « déloyale -et donc répréhensible- si elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu’elle altère ou est susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur ».
Les pratiques des propaniers sont déloyales et altèrent le comportement du consommateur sur plusieurs points.
a) Les propaniers sont tenus d’offrir les citernes à la vente de manière à laisser le choix aux consommateurs entre une consignation assortie d’une exclusivité de remplissage d’une part et la vente du réservoir sans exclusivité de remplissage d’autre part (Décision de la Cour d’Appel de Versailles de 2005). On en déduit que le fait de simuler la vente des citernes sans jamais réellement la proposer est une pratique déloyale dont l’objectif consiste à maintenir les clients en état de dépendance. On remarquera que le taux de propriété des citernes en France (5 % environ) reste très loin de celui des pays où les citernes sont librement proposées à la vente par un certain nombre de distributeurs ( Allemagne entre 15 % et 25 % selon les régions) , et reste proche de celui des Etats des Etats-Unis où les clients sont, comme en France, fortement dissuadés d’acheter les citernes (ce qui est le cas en Nouvelle Angleterre). On peut donc déduire du très faible taux de clients propriétaires de leur citerne que les consommateurs français sont très fortement dissuadés d’acheter les citernes, constat que la DGCCRF ne manquera pas de faire dès lors que le législateur l’autorisera à faire des contrôles incognito (possible depuis la loi Hamon).
b) Dans ses diligences professionnelles, le propanier doit proposer des avantages tarifaires aux consommateurs qui souhaitent devenir propriétaires de leur citerne car il ne peut prendre prétexte d’une pseudo-gratuité de la citerne pour offrir le même tarif aux propriétaires et aux non-propriétaires. Dans les pays où il existe un nombre significatif de propriétaires de citerne, ceux-ci peuvent se prévaloir de tarif remisés, le différentiel de tarif correspondant à la prise en charge par le consommateur de l’amortissement de la citerne. Or en France il n’existe aucun barème spécifique pour les propriétaires de citerne, ce qui confirme que les propaniers cherchent à dissuader les consommateurs de devenir propriétaires de leur citerne. La manoeuvre des propaniers consistant à faire croire aux consommateurs qu’ils n’ont aucun avantage tarifaire à attendre de devenir propriétaires de leur citerne est particulièrement déloyale. A cet effet on observera que les contrats ne prévoient de réduction tarifaire (même symbolique) que lorsque le consommateur choisit la livraison « automatique » à la guise du propanier (ie sans commande préalable) mais aucune réduction ne lui est accordée en raison de la prise en charge de l’amortissement de sa propre citerne par le consommateur.
c) Etant donné que les propaniers français disposant d’une couverture nationale proposent depuis toujours le même type de contrat liant la fourniture du gaz à la citerne ou à sa maintenance de manière à réclamer en toute occasion l’exclusivité de remplissage, il est permis de penser qu’il s’agit d’une manoeuvre déloyale vis a vis du consommateur pour préserver une exclusivité illégitime. A partir du moment où le consommateur renonce à l’achat de la citerne, il n’est jamais proposé aux consommateurs de scinder les trois prestations en 3 contrats indépendants les uns des autres (approvisionnement, mise à disposition, entretien de la citerne) ou de refuser l’une d’elles: les consommateurs ne sont pas laissés libres de l’empilage des différents contrats. Ils doivent tout prendre ou tout laisser. De ce point de vue, l’indifférenciation des différentes offres commerciales des propaniers nationaux sert d’éteignoir à la concurrence, le client n’ayant que peu d’intérêt de changer de distributeur puisque l’offre contractuelle reste identique d’un propanier à l’autre. Les propaniers arrivent ainsi à persuader les consommateurs d’une part qu’il ne sert à rien de changer de distributeur, et d’autre part qu’il n’est pas possible de s’approvisionner en gaz en France sans accepter formellement soit une mise à disposition de citerne, soit un contrat de maintenance du matériel, soit les deux ensemble. Enfin les propaniers n’accordent rien au consommateur en contrepartie de l’exclusivité obtenue, si ce n’est une manière particulièrement arrogante de traiter les demandes insistantes du client, ainsi qu’une qualité de service très en dessous de ce que le consommateur est en droit d’attendre.
d) Enfin on notera que les propaniers justifient l’exclusivité d’approvisionnement pour des raisons de sécurité, ce qui est particulièrement déloyal vis a vis du consommateur et démontre leur mauvaise foi. En effet , aux yeux des propaniers, il semble n’exister aucune échelle rationnelle des risques en matière de sécurité des citernes. Mieux : cette échelle des risques semble indiquer que le consommateur individuel représente le risque maximum ( parce qu’il s’amuse avec sa citerne ?). Or dans n’importe quelle industrie l’ échelle des risques est toujours proportionnelle à la quantité stockée : la citerne petit vrac du consommateur devrait être située tout en bas de l’échelle, et celle des dépôts de GPL tout en haut de l’échelle des risques. En effet on manipule en permanence le propane dans les dépôts, et on le fait parfois dans des conditions délicates, avec du matériel plus fatigué que celui installé chez les particuliers, lequel n’est sollicité qu’une à deux fois par an au maximum. Il est donc dans la logique des choses d’observer que les centres de stockage de GPL explosent régulièrement en faisant des dégâts gigantesques (j’ ai compté sur Internet une explosion tous les deux ans rien qu’en Amérique du Nord – USA + Canada. Ici une video aérienne de la destruction d’un dépot de GPL en Allemagne ) alors qu’on ne trouve aucune trace d’accident au domicile de particuliers depuis des années (l’explication se trouve aussi ici). Dans cette échelle des risques intuitivement fondée et confirmée malheureusement par la litanie des catastrophes industrielles, le gros consommateur de propane se situerait donc plutôt en haut de l’échelle des risques : d’une part les raccords de ses citernes, points névralgiques s’il en est, peuvent être sollicités tous les jours, et d’autre part les quantités de propane stockées chez un industriel ou dans une coopérative agricole peuvent facilement atteindre l’équivalent d’un petit dépôt de propane. Ces industriels devraient donc se voir obligés à une stricte exclusivité de remplissage si l’on suit l’argumentation des propaniers sur la nécessité de justifier l’exclusivité de remplissage par le niveau de danger. Pourquoi dans ces conditions, les industriels sont ils les moins soumis aux impératifs d’exclusivité ? Pourquoi les seuls clients des propaniers français qui bénéficient de nos jours d’une « dispense » d’exclusivité de remplissage pour autant qu’ils soient propriétaires de leur citerne sont les gros industriels dont les installations (de type SEVESO) n’ont rien à voir, du point de vue de la sécurité, avec la ridicule petite citerne du particulier ? Tout ceci prouve bien que l’argument sécuritaire opposé par les propaniers contre le remplissage des citernes de particulier par la concurrence ne tient pas la route (on trouvera d’autres développements de cette question dans une longue dissertation que je ferai dans les prochains mois ici)
2eme partie : La mascarade des clauses abusives ou comment le consommateur se fait massacrer en fin de contrat
A suivre
3eme partie : la farce des clauses abusives ou comment le consommateur se fait dindonner en cours de contrat
A suivre
En attendant de lire la suite, vous trouverez sur cette page de la Commission des Clauses Abusives, la liste , longue comme un jour sans pain, des clauses abusives qui continuent pour partie, de sévir dans les contrats Vitogaz, en dépit de la décision de la Cour d’Appel de Versailles