Si l’on en croit la presse anglo-saxonne, de la Nouvelle Zélande aux territoires inuits du Canada, les bouteilles de propane et autres recharges de gaz en vente libre sont les nouveaux inhalants à la mode chez les ados desoeuvrés à la recherche de drogues bon marché et en vente libre. Danger d’intoxication mortel : chaque jour des enfants meurent d’ignorer le danger d’inhaler du GPL. Dans plusieurs pays anglo-saxons, les autorités sanitaires prennent désormais le problème très au sérieux. Pas de risque que cela nous arrive en France : au prix de la recharge de gaz, nos enfants seront épargnés encore quelques années. Payer le butane et le propane à prix d’or peut avoir quelques (très) bons cotés.
Cependant, la pratique consistant à sniffer du gaz intoxiquant sur le lieu de travail semble actuellement très en vogue chez les cadres d’Antargaz, sans que l’on sache si cela résulte du désœuvrement habituel chez les propaniers en période estivale, ou s’il s’agit, de la part des personnels concernés, d’une recherche inconsciente de nouvelles sensations dans un univers professionnel réputé pour son immobilisme austère.
En atteste la lettre extravagante reçue en juin dernier par un client Antargaz en réponse à sa demande de rachat de citerne. La lettre est signée du responsable local du Service Clients à Marignane. Le responsable en question avait t’il dépassé la dose de propane autorisée ? Avait-il abusé du pastis ? Ou bien a t’il juste cherché à inventer une nouvelle galéjade ? Les propaniers français n’ont certes jamais manqué d’imagination, et même d’audace, pour dissuader oralement les consommateurs de devenir propriétaire de leur citerne. Mais il est quand même assez rare de les surprendre en train d’écrire n’importe quoi sur un sujet qu’ils sont censés connaitre sur le bout des doigts. On commencera par prendre connaissance de la lettre reçue par ce consommateur en cliquant sur le lien ci-dessous :
Cliquer pour accéder à scan-lettre-antargaz.pdf
Je profite de l’occasion pour rappeler à nos fidèles lecteurs, clients Antargaz souhaitant devenir propriétaire de leur citerne, de se dépêcher de se manifester auprès de leur fournisseur habituel. Il est plus que probable qu’Antargaz ne proposera pas indéfiniment à ses clients la possibilité de racheter les citernes. La concurrence n’a jamais fait partie de l’ADN de cette société.
Voici donc mes remarques et commentaires au sujet des mensonges contenus dans la lettre Antargaz (les paragraphes sont numérotés comme sur la lettre) :
Paragraphe 3 : depuis qu’Antargaz autorise régulièrement ses clients à racheter ses citernes ( fin 2014), le propanier en a profité pour augmenter de 50 % le prix de vente de ses citernes d’occasion ! A supposer qu’Antargaz se soit fait tordre le bras par l’Autorité de la Concurrence pour proposer la vente de ses citernes d’occasion en contrepartie du rachat de Totalgaz, on peut penser que cette augmentation récente du prix des réservoirs d’occasion fait partie de l’arsenal de mesures prises par les dirigeants d’Antargaz pour limiter l’effet d’aubaine pour les consommateurs intéressés par le rachat de leur citerne. La lettre que nous allons décortiquer à la suite fait bien évidement partie de la même tactique dissuasive.
Paragraphe 6 : une phrase de ce paragraphe mérite de figurer dans les annales du GPL français « En tant que propriétaire du réservoir, vos différentes obligations en tant qu’exploitant d’appareil à pression ….. ». Laissons de côté la maladresse de l’expression écrite qui vise à cacher le loup. Quel rapport y a-t-il entre un « propriétaire de réservoir » et un « exploitant d’appareil à pression » ? D’un point de vue réglementaire, cela n’a strictement rien à voir. Telle que formulée ici, la phrase n’a donc strictement aucun sens. En entremêlant ces deux notions clés de la réglementation des réservoirs sous pression dans une même phrase, Antargaz sous-entend que le consommateur qui rachète sa citerne en devient « de facto » l’exploitant, et qu’il y aurait une espèce d’équivalence entre le statut de propriétaire et celui d’exploitant. C’est évidement totalement faux. Mais peu importe la vérité aux yeux d’Antargaz, puisque le seul but est de faire peur au consommateur et le dissuader de racheter sa citerne. Propriétaire d’une citerne, chacun sait ce que cela signifie (à défaut de savoir ce que cela implique concrètement)……. mais « exploitant de citerne » ?
En vérité, parmi la centaine de particuliers propriétaires de citerne au sein du Groupement Propane Libre, seuls un ou deux ont fait le choix plus ou moins assumé, d’exploiter eux-mêmes leur citerne. Dans les conditions de fonctionnement du marché actuel du propane vrac, et étant donné l’absence d’appui des pouvoirs publics en faveur d’une vraie libéralisation du marché, les consommateurs n’ont pas grand intérêt à devenir exploitant de leur citerne ( c’est à dire à assumer la responsabilité du maintien en condition opérationnelle du réservoir) à partir du moment où ils peuvent compter sur un propanier capable de les décharger de cette responsabilité à des conditions économiques décentes. A l’inverse ils ont tout intérêt à devenir propriétaire de leur citerne ce qui leur permet de changer de fournisseur tous les ans…
Voilà ce qui a pu se passer dans la tête du rédacteur au moment d’écrire cette phrase qui n’a aucun sens : on rappellera que pendant des décennies les propaniers ont menti de manière éhontée aux consommateurs (et ils continuent bien entendu de le faire) sur l’air de « Ne cherchez pas à acheter une citerne de gaz car lorsque vous en serez propriétaire, vous aurez des tas d’obligations à respecter et les soucis de sécurité seront pour votre pomme». Ce discours mensonger a été propagé en France depuis toujours par les propaniers. Ce mensonge consiste à cacher la différence au plan réglementaire entre le statut de « propriétaire de citerne de gaz » et le statut d' »exploitant de citerne de gaz » : le propriétaire de citerne n’a aucun tracas réglementaire. Les ennuis éventuels, s’il doit y en avoir (réparation de clapet… etc) ne seront jamais à gérer par le propriétaire, mais bien par l’exploitant de la citerne. C’est là la principale raison d’être du statut d’exploitant dans la réglementation des « réservoirs sous pression ».
Celui qui a rédigé ce courrier a donc commencé par déballer le mensonge habituel des propaniers « En tant que propriétaire du réservoir, vos différentes obligations …. » Puis, à cet instant précis, un sursaut d’honnêteté l’a obligé à corriger ce qu’il venait d’écrire et à préciser que les « différentes obligations » en question ne résultent pas de sa qualité de « propriétaire », mais uniquement de son choix de devenir en sus « exploitant » de sa propre citerne. Un choix dont le rédacteur se garde bien de préciser qu’il n’intéresse aucun consommateur. Ce dernier, s’il s’en tient strictement au statut de propriétaire, n’aura donc aucune obligation réglementaire…. sinon celle de désigner librement le futur exploitant de sa propre citerne !
Ce lapsus révèle en réalité au grand jour le stratagème utilisé depuis des décennies par les propaniers du cartel du gaz en citerne pour dissuader les consommateurs d’acheter les citernes : en introduisant la confusion entre les obligations du propriétaire et celles de l’exploitant, ces menteurs patentés inventent de toutes pièces des obligations et des responsabilités pour les propriétaires de citernes de gaz. Ils parviennent ainsi sans effort à dissuader les consommateurs de devenir propriétaire de leur citerne. En se réservant la propriété des réservoirs, ils rendent très difficile l’irruption de concurrents indésirables sur ce marché.
Paragraphe 7 : s’agissant du cas peu courant du propriétaire exploitant lui-même sa citerne, mis en avant par Antargaz au paragraphe précédent, il n’y a, à mon sens, aucune obligation de « choisir un prestataire » extérieur pour les inspections périodiques triennales. Il n’y a par ailleurs aucune formation professionnelle officielle pour acquérir les compétences de vérificateur de citernes de gaz (hormis en interne chez les propaniers). Sauf erreur de ma part, tout propriétaire exploitant de citerne de gaz peut, s’il s’estime qualifié pour le faire, réaliser lui-même les 2 inspections périodiques triennales intercalées entre chaque révision décennale. En effet ces inspections périodiques consistent en de simples « examens visuels approfondis », la seule chose requise du vérificateur est d’avoir une bonne vue, un peu de bon sens et quelques souvenirs des cours de chimie au lycée sur l’oxydation des métaux, pour être en mesure d’évaluer l’état de la citerne et de ses accessoires ! L’obligation de choisir un prestataire extérieur ne s’imposerait donc au propriétaire exploitant que pour la requalification décennale .
Paragraphe 9 : L’inspection d’un réservoir enterré nécessiterait de le déterrer tous les 40 mois ! On nage ici en plein délire, ou (plus grave) dans la désinformation outrancière. Dans toute l’histoire des citernes de gaz, jamais une seule citerne n’a été déterrée dans le but de pour pouvoir procéder à une inspection périodique.
Paragraphe 14 : La requalification du réservoir enterré nécessiterait de déterrer le réservoir ! Toujours la même désinformation. Disons le tout net : il n’y a aucune obligation réglementaire de procéder au déterrement du réservoir pour sa requalification. En Allemagne aucun réservoir n’est déterré en vue de sa requalification. En France, il est vrai que le faible nombre de réservoirs réellement requalifiés (du fait de la procédure de sélection par échantillonnage), permet aux propaniers de s’offrir le luxe de déterrer tous les réservoirs désignés par le sort, pour les emmener en usine aux fins de requalification. Mais en ce qui concerne le particulier ou l’industriel propriétaire d’un ou de plusieurs réservoirs enterrés, la requalification du réservoir se fait quasiment toujours « in situ », sans déterrer le réservoir, grâce à un procédé d’« émission acoustique » capable de détecter les anomalies d’épaisseur dans l’acier de la citerne. Nul besoin de déterrer les réservoirs enterrés pour les requalifier ! Encore un gros mensonge.
Conclusion : voilà une lettre qui dénonce involontairement les mensonges habituels dont sont abreuvés les consommateurs et les entrepreneurs français pour les dissuader d’acheter les citernes. Ce florilège d’âneries et de mauvaise foi nous permet de comprendre pourquoi les propriétaires de citernes ne représentent en France que 3 % du parc installé. Une situation qui, à n’en pas douter, convient parfaitement aux professionnels du gaz propane.
Bonjour,
Je viens de recevoir exactement le même courrier de la part d’Antargaz.
Ce que vous écrivez donc me rassure énormément, je vous en remercie.
J’ai cependant une question: la requalification décennale n’est-elle pas comprise dans le forfait entretien/maintenance proposé par les propaniers?
Je n’ai pas l’impression que les locataires de citernes doivent payer une quelconque requalification décennale de leur citerne. Alors pourquoi un propriétaire le devrait-il à partir du moment où lui aussi s’acquitte du même tarif concernant la maintenance et l’entretien de sa citerne?
Cordialement
Bonjour
Je vois que vous êtes tombé sur l’article qui répond à la plupart de vos questions. Lorsque vous signez un contrat de fourniture de gaz en tant que propriétaire d’une citerne, le propanier qui vous propose une maintenance est évidement obligé d’inclure la requalification décennale dans sa proposition tarifaire. Mais il est libre de la manière de présenter ces frais de maintenance : la révision décennale peut être proposée sur une ligne à part ou, la plupart du temps, incluse dans ces frais. Ce qu’il ne peut pas faire, c’est omettre d’inclure le prix de la requalification dans ses frais d’entretien et de maintenance.
Concernant la différence de situation entre locataires et propriétaires, vous avez parfaitement raison de vous étonner. En réalité si vous êtes locataire, force est de constater que les propaniers s’arrangent quand même pour vous faire payer la révision décennale à travers des frais de maintenance prohibitifs. Et si vous êtes propriétaire, vous les paierez bien évidement « au grand jour ». Ainsi, quel que soit le cas de figure, vous paierez la révision décennale. Donc autant devenir propriétaire de sa citerne ( cet argument confondant doit figurer dans ma liste d’arguments sur la page consacrée à l’achat de la citerne… ) Cordialement